Alors j'ai peins
j'ai posé des couleurs à la place des mots
des toiles à la place des feuilles
j'ai peins ton coeur de rouge
de noir le mien celui des autres de divers tons
de mille nuances
dans une poitrine bleue immense
comme une préférence
ton corps c'est plus facile à dessiner qu'à dire
pour comprendre la beauté c'est mieux que parler ou écrire
les mots les vers les phrases les poèmes
ne suffisent plus
j'ai peins ta revenue comme des arbres feuillus
je ne savais plus parler
devant la toile blanche de la mer
j'ai tracé les courbes je les ai illuminées
en silence
je ne savais quoi dire
mais avec l'aide des couleurs juxtaposées le gris en vert
le rouge du dedans mêlé à celui du dehors
dans
la ferveur d'un coucher
au destin comme une transparence
une mouette envolée qui te porte sur son dos
la regarder
dans l'azur blanche et toi riante
c'est plus aisé à l'oeil et à travers les cils
le coeur
dans l'immobile de ma maison- marine
je me suis installé devant mes chevalets
silences de mes ateliers imaginaires
j'ai exprimé par des grands ronds serrés
toutes les passions
et j'ai compris que les mots devenaient inutilisables
qu'ils n'avaient aucune raison de vivre
j'ai écrit au pinceau des lettres et des chevaux
des formes dressées de sexes et de velours
des lumières éclatantes et des nuits sans sommeil
des grottes profondes et sensuelles avec des parois
divines de toutes les pudeurs
des corps enchevêtrés des odeurs de sueurs des parfums de lavande
des moments de cris de soupirs et de feux
j'ai peins nous deux
comme jamais nous n'arriverons à le dire
j'ai peins encore pendant des milions d'années
puis doucement je me suis endormi
du grand sommeil d'aimer
j'avais dessiné toutes les joies tous les sentiments
toutes les morts associés
avec ta main posée sur mon bras délicatement