Les murs ont des voix de ciment,
ils se veulent durs
mais aucun d’entre eux n’a assez de force pour durer,
ils s’effritent déjà,
ni colonnes,
ni piliers qui ne soient inébranlables.
Le ciel a une voix de minot qui mue,
qui mue sans cesse,
tour à tour gris, d’argent,
d’ardoise,
glauque,
le ciel est un adolescent qui n’en finit pas d’être pubère.
Toi, tu as une voix de bruant
donnant le sein à des coquillages d’aventurines,
embrasant le phosphore dans des cruchons de lait
et tu parles comme éclaires,
tu soupires comme modelant des nuages,
tu ris, chantes, tel douillet crachin de cachemire.
Le vent n’a pas de voix,
il en a des troupeaux,
un souhait, un vœu, un pleur, une requête, une prière :
il a une gorge pour chaque pèlerin qui ont, d’eux,
déposé dans le corps de sa tanière folle et galopante,
et dieu seul sait où il emporte son butin.
La puce a une voix d’archer qui décoche,
décoche comme elle va bottée de sept lieues
et le verre a une voix de sable,
de sable qui passe le temps,
de sable qui s’ennuie,
qui, parfois, voudrait redevenir grain.
La craie a une voix d’enfant qui peuple des royaumes.
La guitare a une voix de ventre,
un ventre plein de chansons qui s’envolent sous des doigts.
Le jouet a la voix gaie du jeu qu’on fait avec sérieux.
Moi, ma voix est le quotidien d’un castrat muet,
le cocon d’une agonie silencieuse,
une daphnie perdue, éperdue, perdue, qui se noie
quand tu ne l’entends pas,
qui meurt à petits feux quand tu ne l’entends plus.