Je fus au matin de ma vie
fasciné d'exister
le moindre des reflets
retenait mon regard étonné
tout était excitant
même les ombres de la nuit
étaient de délicieux frissons
mon coeur gonflé de sève
était avide de tout respirer
je partais à cheval
sur des nuages d'or
je tutoyais les anges
le temps s'ouvrait devant
sur des ravissements
d'effluves enivrants
en rayons lumineux
j'allais insouciant
j'allais papillonnant
une brise prometteuse me guidait
je me posais ici ou là
aiguillonné
sens aiguisés
je butinais la vie
je n'avais pas encore rencontré
sur ma route
l'ombre du cadavre d'un coeur
Je fus au matin de ma vie
fasciné d'exister
puis je me suis frotté
à l'exigeante nécessité de vivre
dans la spirale infernale
des lois économiques
je me suis fourvoyé
je me suis enlisé
jusqu'à l'assujettissement.
Voilà que maintenant
je vois poindre le soir
et le moment n'a jamais été
aussi fugitivement beau...