Hymne au fleuve

Petite note, le "jamais goûté" est un poisson, et la farine de manioc s'appelle du "couac".



Fleuve,
grand fleuve,
fascinant serpent de cannelle
offrant sa verve,
ses tisons d’eaux souveraines,
couronnes de fraîcheurs
et moiteurs câlines,
son verbe d’or,
mille chansons d’oiseaux en flambées
dans une seule goutte de pluie,
ballet du reptile
dans l’orchestre de l’émeraude,
et la fleur peinte
du plus pur pigment,
l’arbre a son luth de citrine,
de cornaline,
et d’orgeat verni comme laque de caramels,
myriades de fratries qui courent,
glissent,
papillonnent,
toilent,
oeuvrent à la terre,
fauves volutes, céruléennes, et feux,
de beurre clair,
safran,
grenadine, intensités de pastels,
enluminures épicées
se brodant frises,
draperies,
à la brise discrète,
au bois,
dans la pénombre tiède
qui s’éclaire du jade ardent,
du jus solaire
au filtre de la feuillée.

Fleuve, long fleuve,
je te désire,
tu m’apaises
comme me soulèves,
je lis en ton cours,
par tes bras,
majestueuse fresque de flots,
asile de vie,
noblesse,
l’identité du vrai,
le sang palpable
en tous mouvements,
l’électrique ondoiement
dont tu animes chaque veine,
œil,
cœur qui bat,
sens en tous sens,
et j’écoute ta parole,
respecte ta force,
ton accueillante et tranquille toute-puissance
bruissante d’écailles en éclairs,
concerts d’élytres moirés,
plongeants carnavals en tes berges sans fins,
infinités d’arômes,
de luttes amicales entre les pousses
baisant leurs visages,
foisonnements de lueurs écloses,
et mysticisme,
aussi,
car sur ton dos nu,
flottent des âmes et des esprits ;
tu silences et musiques l’être,
le devenir,
et ce qui fut
dans un cristal de châtaignes.

Fleuve, fleuve, fleuve,
l’ami,
le confident,
compagnon de mes songes,
je me veux à tes côtés,
encore et toujours,
avec la farine du manioc,
le jamais goûté,
au feu de bois,
avec le thé et le piment apporté,
pour boire ma sève et mon échine
dans la langue de ton eau,
fraternelle,
et nourricière,
refuge,
libératrice,
à l’éloquence secrète,
belle,
hypnotique et légère,
iridescent berceau de quiétudes,
chaudes,
et folles sagesses.

encore une belle balade odorante...
Tout grouille de vie, de senteurs...

Il y a comme l'odeur du Maroni ...
Mon regard se fait pirogue et je me laisse aller au courant des mots. Le fleuve est long, varié, explosif de mystères et de senteurs.
Un poème orpailleur révélant une belle recherche dans les termes et la façon de les accommoder.

Voilà un certain temps que je n'avais voyagé aussi loin ... pour moi, j'étais sur le fleuve amazone assailli (pacifiquement) de milles senteurs, couleurs et autres bruissements de la vie ...

Merci pour cette balade secrète.

H.S.

La Maroni, le Mahuri, l'oyapock, doigts de la main Amazone, et je vous remercie de vos passages sous ma modeste aubade à ces eaux, leurs esprits, fascinantes.

Amitiés.